L’ANGE : chronique

08-01-2019 - 13:49 - Par

L’ANGE : chronique

Pas forcément un sommet d’écriture, mais avec L’ANGE, le crime movie trouve une alternative rafraîchissante.

 

Carlitos Robledo Puch a glacé l’Argentine dans les 70’s, quand il a été arrêté après avoir perpétré 11 meurtres, des vols, des agressions – sexuelles ou pas. Il n’était qu’un ado au visage d’ange, avec un cœur de diable. On s’attendait donc – et légitimement– à un thriller aussi graphique que tendu, morbide, peut-être sordide, où la police resserrerait ses filets sur ce criminel en culotte courte. C’était sans compter le parti pris de Luis Ortega –celui toujours problématique de raconter l’horreur sous un angle ultrapop… mais qui s’avère payant. Comme tous les méchants, Carlitos n’est rien de plus que le héros de sa propre vie et il nous entraîne dans son monde de déni (le vrai Puch n’a jamais vraiment cherché la rédemption), plein de couleurs, de cavalcades criminelles, de chansons en espagnol à fond les ballons. Avec ses bouclettes blondes et ses pantalons en velours, son déhanché démoniaque et ses lèvres pulpeuses, Carlitos (joué par la sensation Lorenzo Ferro), cambrioleur compulsif, marche à la séduction languide et à la persuasion facile. Lui et son copain Ramon (le flamboyant Chino Darín, fils de Ricardo), un grand brun ténébreux, vont devenir une paire de malfaiteurs, amoureux et reptiliens, Carlitos est la Marilyn de Ramon, son Evita, et ensemble, ces deux êtres complémentaires et sensuels vont être les metteurs en scène de leur monde délirant, violent et super cul. Sans abuser de la reconstitution des années 70 ni du grain de leur cinéma, Ortega réalise un film d’époque somptueux, prenant un plaisir évident à marier les extrêmes : le luxe que Carlitos et Ramon désirent et le quotidien popu qu’ils vivent, la beauté de ces bandits et leur laideur intérieure. L’ANGE raconte la vie désaxée d’un tueur sans jamais devenir la fiche Wikipedia qu’on pouvait redouter: il n’y a aucune volonté à répertorier tous les méfaits de Puch, ni à entrer trop en profondeur dans sa psychologie. D’un côté, Luis Ortega trivialise souvent ses crimes – ils ne sont jamais traités comme des événements majeurs –, de l’autre, le film fait l’impasse sur les exactions les plus graphiques qu’il a pu perpétrer. Aucune trace du viol pour lequel il a été condamné, ni du meurtre par étranglement… Le film se contente de suggérer ce dont il est capable sans jamais le montrer clairement. On peut lui reprocher d’éclipser des faits importants mais l’effet est implacable : si son « héros » est dans le déni, c’est d’abord sa chute qu’il ne voit pas venir. Et nous avec. La structure du film, qui ne s’annonce jamais par avance, reste surprenante et captivante, presque aérienne. 

De Luis Ortega. Avec Lorenzo Ferro, Chino Darín, Mercedes Morán. Argentine. 2h06. Sortie le 9 janvier

4Etoiles

 

 

 

 

Pub
 
 

Les commentaires sont fermés.