Fantastic Mr Fox : chronique

Wes Anderson, héros du ciné indé-cool américain se lance dans l’animation en stop motion en adaptant un classique de la littérature anglaise. Réussi mais froid.

Le style de Wes Anderson c’est : des personnages largués, décalés et/ou marginaux, des histoires de familles contrariées, une mise en scène inventive, une bande son old school et pour certains de ses contempteurs, beaucoup de frime. Avec FANTASTIC MR FOX, film d’animation réalisé image par image, le réal reprend une grande partie de cette formule, en l’immergeant dans le genre très balisé du long-métrage pour petits et grands. Forcément, cela ne ressemble à rien de ce que l’on a pu voir auparavant, créant un grand vent de fraîcheur. Sauf que FANTASTIC MR FOX reste un opus assez clinique duquel ne ressort au final assez peu de ce qui faisait le sel de ses précédents films : le fun et l’émotion.

Mr Fox est un renard malicieux, spécialisé dans le vol de poules. Mais sa femme, Felicity, lui demande de se ranger. Mr Fox devient journaliste dans le canard du coin, et sombre dans l’ennui. Douze ans plus tard, il décide d’emménager dans un bel arbre avec son épouse et son fils Ash, avec qui il entretient des relations difficiles. A proximité de leur nouvelle résidence, les élevages de trois fermiers retors. Mr Fox, trop tenté, retombe dans ses activités passées, et attire la colère de ces derniers… Dès la première scène du film, un remarquable moment de suspense et de comédie, FANTASTIC MR FOX impressionne. Surannés, le look et l’animation des héros s’inscrivent dans une sophistication de mise en scène qui ne se démentira pas tout au long du métrage. Anderson aligne une idée de découpage, de cadrage ou de narration par l’image à la minute, faisant de son FANTASTIC MR FOX un égal des classiques d’Aardman ou de Pixar. On retrouve aussi son talent pour la caractérisation de personnages, chacun ayant une personnalité marquante et attachante, tantôt par la grâce d’un costume, tantôt par le talent du casting voix et de dialogues remarquablement écrits, ou mieux, par la magie d’un langage corporel dont on oublie qu’il est pourtant totalement artificiel. Le tout cadencé au son des Beach Boys, Rolling Stones, Jarvis Cocker et autres Burl Ives. Bref, FANTASTIC MR FOX est un régal d’esthétisme, de cinéma modelé avec passion et inventivité. D’autant que la qualité du récit, adapté du classique écrit par Roald Dahl (« Charlie et la chocolaterie », « James et la grosse pêche »…), ménage autant les moments de comédie, de folie douce, ou de morale pour petits et grands. Pourtant, malgré toutes ses immenses qualités, c’est avec un pincement au cœur que l’on constate que Wes Anderson ne parvient pas totalement à insuffler d’âme à son film. Si tous ses précédents opus avaient eux aussi cette distanciation d’avec le public, évitant toute putasserie, LA FAMILLE TENENBAUM ou LA VIE AQUATIQUE (pour citer ses deux meilleurs), parvenaient à sournoisement créer du lien avec le spectateur via une mélancolie crève-cœur venant créer une émotion aussi soudaine qu’un tsunami (la tentative de suicide de Luke Wilson dans TENENBAUM en étant l’exemple parfait). Moins partageur, FANTASTIC MR FOX n’en demeure pas moins un long-métrage suffisamment blindé de talent et de singularité pour justifier l’achat de sa place.

Fantastic Mr Fox, de Wes Anderson. Etats-Unis. Avec les voix VO de George Clooney, Meryl Streep, Jason Schwartzman, Bill Murray et VF de Mathieu Amalric, Isabelle Huppert. 1h28. Sortie le 17 février 2010.