LE SEUL ET UNIQUE IVAN : chronique

31-08-2020 - 18:29 - Par

LE SEUL ET UNIQUE IVAN : chronique

La forme peine mais le fond se révèle bien plus fort. Dommage qu’il aboutisse à un total non-sens idéologique.

 

Ivan (Sam Rockwell), gorille dos argenté, est la star d’un spectacle cornaqué par Mack (Bryan Cranston) dans un centre commercial. À ses côtés : une poule, une otarie, un lapin, un caniche et une éléphante. Lorsqu’un éléphanteau s’ajoute à la troupe, Ivan entre en introspection et se met à rêver, pour lui et ses comparses, de liberté dans la nature sauvage… Avec ses animaux parlants anthropomorphisés, sa musique sautillante et sa photographie colorée, LE SEUL ET UNIQUE IVAN est formellement à la peine. Bien qu’émaillé de quelques très beaux plans, sa mise en scène reste coincée à l’état du fonctionnel. Succombant au formatage du film familial – contrairement à TOGO –, son exécution ne s’affranchit jamais d’un écrin artificiel, pour ne pas dire factice, où s’alignent poncifs sentimentalistes et dialogues faciles. Pourtant, de ce marasme affleure non seulement l’émotion, mais également le propos. Le fond, ainsi, se révèle bien plus affûté, voire acerbe. Se dégage ainsi quelque chose de profondément déprimant de ces images d’animaux assaillis de sentiments forts derrière leurs barreaux, espérant leur liberté tout en aimant les humains qui les entourent. Une émotion qui ne relève pas uniquement de la projection du spectateur puisque le film, par petites touches, explore son sujet. Il expose ainsi l’absurdité qu’un gorille ait à rugir pour satisfaire un spectacle de pacotille, ou tout ce qui mène à la maltraitance, même fortuite, d’animaux qui ne devraient jamais avoir à exploiter leur intelligence pour exécuter des tours. LE SEUL ET UNIQUE IVAN, furtivement, détruit ainsi brique par brique l’illusion de légèreté bâtie dans les premières séquences. La surprise est grande, les émotions fortes, si bien que la mise en scène parvient même à un moment de grâce – Ivan se souvient quand il peignait enfant, le montage alterné plaquant le son du passé sur les images du présent. Sauf que. LE SEUL ET UNIQUE IVAN, tout comme le roman de Katherine Applegate qu’il adapte, s’inspire de l’histoire vraie d’un gorille prisonnier pendant 27 ans d’une cage et d’un spectacle en intérieur, libéré dans les années 90 à la suite de protestations pour finir placé… au zoo d’Atlanta. Un simulacre de liberté et de nature sauvage dévoilé dans les cartons de fin, mais maladroitement atténué dans la conclusion romancée du film. Celui-ci enjolive-t-il les faits pour aspirer à une réalité plus belle ? Disney expose des animaux sauvages dans certains de ses parcs – dont Animal Kingdom en Floride, objet de critiques et de controverses. Devant LE SEUL ET UNIQUE IVAN, difficile de l’oublier.

De Thea Sharrock. Avec Bryan Cranston et les voix de Sam Rockwell, Angelina Jolie. États-Unis. 1h35. Sur Disney+ le 11 septembre

2Etoiles

 

 

 

 

Pub
 
 

Les commentaires sont fermés.