EVERYBODY WANTS SOME !! : chronique

21-04-2016 - 11:59 - Par

EVERYBODY WANTS SOME !! : chronique

Des étudiants passent un week-end d’enfer avant de débuter l’année de fac. Désinvolte, drôle et romanesque : de retour à la stoner comedy, Richard Linklater rappelle qu’il filme le passage branque à l’âge adulte comme personne.

EWS-PosterRichard Linklater a de la suite dans les idées : deux ans après avoir laissé le héros de BOYHOOD au seuil de la fac, prêt à arpenter le monde et la vie sur fond de soleil couchant et de pop folk doucereuse, il se penche sur l’arrivée d’un autre jeune garçon, Jake, à l’université. Nous sommes en 1980, on écoute « My Sharona » et « Rapper’s Delight », on danse encore le disco – et un peu le punk et la country, aussi –, les garçons arborent la ‘stache triomphante, les filles le mini-short en jeans. Pendant tout un week-end avant le début des cours, Jake et ses nouveaux amis, tous issus de la très réputée et efficace équipe de baseball, vont picoler, se défoncer, séduire, coucher, prendre des vestes, s’affronter au ping-pong, disserter sur tout et rien. Le tout le verbe haut et la certitude que le futur sera radieux. Vingt- trois ans après DAZED & CONFUSED, Linklater refait le coup de la stoner comedy explorant le champ des possibles et auscultant le cœur palpitant de la jeunesse. Mais pourquoi se pencher sur celle des années 1980 et pas celle d’aujourd’hui ? Parce qu’EVERYBODY WANTS SOME !!, comme la plupart des meilleurs films du réalisateur texan – de la trilogie BEFORE à BOYHOOD ou ROCK ACADEMY –, ne s’attache pas tant à délivrer un propos sociologique qu’à toucher à une certaine universalité. À des pensées existentielles qui pourront apparaître banales mais qui pourtant, illustrent une vérité profonde. Ici, ce que traversent à peu près tous les jeunes gens ayant l’âge adulte en ligne de mire – et les hormones en effusion. Mais là où BOYHOOD débordait d’une mélancolie souvent déchirante, transmettait sur douze ans la douleur inhérente au passage du temps et la fugacité du bonheur, EVERYBODY WANTS SOME !! prend le contre-pied. En ramassant son récit sur un week-end, Linklater s’attache au romanesque exaltant de l’instant, aux possibilités dont chaque seconde recèle. Dans son immédiateté, EVERYBODY WANTS SOME !! se révèle charmant, joliment stupide, hilarant, alerte. Il s’assume en pure comédie avec ses archétypes, ses vannes écrites au cordeau, ses situations fofolles et ses seconds rôles allant du lunaire sympathique au freak flippant. « Les frontières sont là où vous les trouvez », voit-on écrit sur un tableau noir. Si l’on dépasse le caractère volontairement foutraque et aléatoire de EVERYBODY WANTS SOME !!, cette succession de beuveries, de discussions « psychédé-geek » autour d’un bong et de calembours grossiers, on pénètre dans un univers débordant de sentiments purs, d’insécurités soigneusement cachées, de mystères transcendants et de questionnements identitaires. Sous le quotidien trivial d’une bande de garçons aimant à jouer aux abrutis réside le sens de la vie, en somme. Armé d’une écriture précise mais libre et d’un casting de jeunes acteurs absolument démentiels de talents n’ayant rien à envier aux Matthew McConaughey, Ben Affleck ou Adam Goldberg de DAZED & CONFUSED, Richard Linklater rappelle avec panache qu’il n’a pas son pareil pour rendre le « banal » assez extraordinaire à regarder.

De Richard Linklater. Avec Blake Jenner, J. Quinton Johnson, Zoey Deutch. États-Unis. 1h57. Sortie le 20 avril

4Etoiles

 

 

 

 

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