WIND RIVER : chronique

31-08-2017 - 10:20 - Par

WIND RIVER : chronique

Après avoir écrit SICARIO et COMANCHERIA, Taylor Sheridan réalise WIND RIVER. Encore un peu vert, mais plutôt convaincant.

Dans une réserve amérindienne, un pisteur (Jeremy Renner) et une agent du FBI (Elizabeth Olsen) enquêtent sur la mort d’une jeune femme… Avec son deuxième film de réalisateur, Taylor Sheridan affirme avoir voulu clore une trilogie, débutée en tant que scénariste avec SICARIO et COMANCHERIA, consacrée à « la Frontière américaine moderne ». De nombreuses passerelles relient donc WIND RIVER aux films de Denis Villeneuve et David Mackenzie. On y retrouve notamment une acuité évidente pour la caractérisation des personnages. Débutant comme archétypes, les deux héros de WIND RIVER se déploient avec une certaine finesse, dans des fêlures écrites et creusées avec soin. L’alchimie qui unit Jeremy Renner à Elizabeth Olsen, la délicatesse de leur interprétation, portent littéralement le film. Grâce à eux, Sheridan transmet avec d’autant plus de force son propos sur la condition amérindienne, entre dénuement total et addictions diverses, lien perturbé à la nature et isolement du monde. « On a l’habitude de ne pas être aidés », lance, ironique et résigné le chef de la police de la réserve, tandis qu’un père, lui aussi natif américain, se dit « fatigué de lutter pour cette existence ». Comme dans COMANCHERIA, Taylor Sheridan offre une voix vibrante à toutes celles et ceux que l’Amérique triomphale n’a de cesse d’oublier. Et, à ce niveau, WIND RIVER se révèle peut-être plus tragique que COMANCHERIA, dont les protagonistes, même aculés et poussés à l’irréparable, parvenaient à prendre leur existence en main pour tenter de faire payer le système qui les oppresse. Les victimes de WIND RIVER, elles, sont forcées au silence par leurs bourreaux mais aussi par des autorités qui les ont confinées dans des étendues neigeuses invivables. Le mérite de l’écriture de Sheridan est de mettre à jour ces souffrances à travers une enquête qui déterre, indice après indice, la manière dont l’Amérique a soumis, puis oublié, toute une population. Malheureusement, dans cette trame policière passionnante, captée avec urgence par une caméra à l’épaule maîtrisée, WIND RIVER n’a pas toujours la finesse de ses intentions. Si quelques dialogues de COMANCHERIA se révélaient sur-signifiants et didactiques, David Mackenzie domptait ces dérapages. Taylor Sheridan, s’il est un scénariste expérimenté, reste un cinéaste débutant. Entre plans au symbolisme appuyé (des loups encerclant des agneaux) et répliques sentencieuses, WIND RIVER n’évite pas les grosses maladresses. Rien qui ne mine son efficacité narrative ou émotionnelle, mais suffisamment pour l’empêcher d’être à la hauteur de SICARIO et COMANCHERIA.

De Taylor Sheridan. Avec Elizabeth Olsen, Jeremy Renner, Graham Greene. États-Unis. 1h50. Sortie le 30 août

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