GOOD TIME : chronique

13-09-2017 - 11:28 - Par

GOOD TIME : chronique

Les frères Safdie sculptent un rôle sur mesure pour Robert Pattinson, un acteur décidément fascinant.

L’arrivée des frères Safdie dans la prestigieuse compétition cannoise, après qu’ils ont arpenté par deux fois La Quinzaine des réalisateurs avec THE PLEASURE OF BEING ROBBED (2008) et LENNY AND THE KIDS (2009), ne se fait pas sans un léger ravalement de façade de leur cinéma. Une star très cannoise en tête d’affiche (Robert Pattinson, comme d’habitude impressionnant), une autre vedette en second rôle (Jennifer Jason Leigh), et un abandon du naturalisme ascétique pur et dur. Alors que beaucoup comparent leur dernier MAD LOVE IN NEW YORK à PANIQUE À NEEDLE PARK, on ressent toujours fortement l’influence du cinéma new-yorkais des années 70 – Leigh campe la femme perdue cyclothymique typique. Jerry Schatzberg ou Martin Scorsese, peu importe: GOOD TIME est peuplé de paumés qui s’invectivent, prennent les mauvaises décisions, marchent à l’instinct et pas au calcul et endurent sans fléchir les coups bas de la vie. Après le braquage d’une banque, Connie (Pattinson) parvient à fuir la police mais pas Nick (Benny Safdie), son frère souffrant de difficultés mentales. S’ensuit une série de péripéties pour récupérer de l’argent et le sortir de prison en payant sa caution. Des péripéties qui enfoncent toujours un peu plus Connie dans la criminalité. Dans des rues mal famées et des quartiers interlopes, les Safdie filment avec une vitalité explosive d’abord l’aventure des deux frères : le long prégénérique et le générique installent le film dans une transe à la Alan Parker, avec sa musique électronique brûlante (on pense à Moroder, mais aussi à Tangerine Dreams) et sa mise en scène au plus près des personnages. Le style visuel est plus celui d’un Scorsese période AFTER HOURS sans le grain de magie qui élevait son cinéma vers une fièvre inexplicable. Prises de vues de nuit, lumières néon ou noires, doublées d’une musique qui ne décolère pas de synthé (Carpenter veille), les Safdie auraient voulu manger du Refn qu’on ne serait pas étonnés. Mais aux antipodes du minimalisme du Danois, ils parviennent plutôt à créer une sorte d’hommage frais et agréable aux pionniers du Nouvel Hollywood et à leur cinéma criard et survolté. Personnages excessifs, molosses qui aboient, musique (diégétique ou extradiégétique) hurlante, sirènes beuglantes : GOOD TIME gueule en continu, généreux, anarchique, tantôt conquérant, tantôt en demande criante d’attention. Aussi politique qu’un film sur les laissés-pour-compte peut l’être (c’est-à-dire « plus vraiment », à notre époque), cette course en avant finit par s’essouffler dans sa dernière demi-heure, mais rien qui n’entame vraiment la démentielle énergie du film.

De Benny et Joshua Safdie. Avec Robert Pattinson, Benny Safdie, Jennifer Jason Leigh. États-Unis. 1h39. Sortie le 13 septembre

4Etoiles

 

 

 

 

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