UNE PRIÈRE AVANT L’AUBE : chronique

19-06-2018 - 18:58 - Par

Priere-Bandeau

Une dizaine d’années après JOHNNY MAD DOG, Jean-Stéphane Sauvaire réalise un nouveau film choc qui marquera l’année.

 

Tout commence par les rituels préparatoires à un combat de boxe thaï. Billy Moore, un Européen expatrié, et son camarade thaïlandais sont scrupuleux. Ils se chauffent respectivement les muscles, se concentrent, se motivent. Bientôt, ils se feront démonter la gueule autant qu’ils exploseront leur adversaire. Il y a dans ce sport de combat une envie de se confronter à la douleur et à ses limites et derrière le chaos, une discipline de vie. Un Blanc qui retourne à la source de la boxe thaï et pratique parmi les puristes entretient probablement un rapport complexe avec la vie et la mort. Billy est héroïnomane ; lorsque la police le jette en prison, le besoin de drogue, l’envie de vivre et l’appel permanent de la mort vont rythmer ses jours. Le film est à l’image de la valse enivrante qu’il danse au quotidien : les images sont une transe en continue, un flow de stimuli, parfois stoppé net et hurlant de peine. UNE PRIÈRE AVANT L’AUBE est d’abord une longue agonie de scènes choquantes, de brutalité, de cris. Un dispositif visuel et sonore immersif avec lequel Sauvaire nous propose de vivre la vie de Billy. Aucune traduction du thaï au français, des invectives et des coups, l’expérience est épuisante. Si Billy est forcé d’être témoin d’un viol en réunion, nous aussi. Il est brimé ? On se sent agressé. Sa drogue devient notre dégoût, ses vertiges nous donnent le tournis. Et lorsque, enfin, il décide de se remettre à la boxe, et que le film reprend une dynamique ascendante, alors UNE PRIÈRE sort du chaos et se structure de lui-même. Le film devient plus narratif, le jeu de Joe Cole s’affine, de la douceur se mêle doucement à sa rage. On parle d’une performance de l’ordre de celles d’un Tom Hardy dans BRONSON puis d’un Tom Hardy dans WARRIOR. Le film de Sauvaire n’est ni dans le baroque du film de NWR ni dans le classicisme du drame de Gavin O’Connor. Mais il en emprunte la folie d’une part et le sentiment de l’autre. On a beaucoup comparé UNE PRIÈRE à MIDNIGHT EXPRESS : de la drogue à l’expérience destructrice de la prison, le parallèle est facile. Mais dans le lien qui se noue entre Billy et les prisonniers boxeurs, que l’on soupçonne plus documentaire que fictionnel, dans l’affection qu’il développe pour l’un des ladyboys, le film est plus intérieur. Et dans cette façon dont, en prison, Billy semble étrangement à part et étrangement dans son élément, UNE PRIÈRE s’ouvre à tout un tas de questions sur le destin et la résilience. Ultraviolent et élégant, le nouveau film de Jean-Stéphane Sauvaire, comme son précédent, tente de sublimer la lumière au bout des longs tunnels de douleur.

De Jean-Stéphane Sauvaire. Avec Joe Cole, Vithaya Pansringarm. Royaume-Uni/France. 2h. Sortie le 20 juin

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