LES MITCHELL CONTRE LES MACHINES : chronique

27-04-2021 - 17:47 - Par

LES MITCHELL CONTRE LES MACHINES : chronique

Phil Lord et Chris Miller ont trouvé leur héritier : dans son premier film, Michael Rianda insuffle énormément de cœur à l’absurdité.

 

« On n’a aucune idée de ce qu’on fait », assure Katie Mitchell. « On » désigne les membres de sa famille dysfonctionnelle qui, en plein road trip de la rabiboche devant mener l’étudiante à sa fac de cinéma, se retrouvent nez à nez avec l’apocalypse. À savoir une horde de robots-assistants transformés en tueurs par PAL, une application en pleine révolte contre son créateur. À première vue, on pourrait croire que les auteurs derrière ce pitch n’ont aucune idée non plus de ce qu’ils font. Michael Rianda (dont il s’agit du premier film) et ses équipes savent au contraire pertinemment où ils vont. Créant le chaos dès la première seconde avec une ouverture in media res qui projette le spectateur dans un déluge de couleurs, d’action, de vannes et d’informations, Rianda installe une filiation d’esprit et de ton avec ses producteurs Phil Lord et Chris Miller. Lui aussi manie le post-modernisme avec brio : cette séquence liminaire inscrit immédiatement LES MITCHELL CONTRE LES MACHINES dans l’ère des mèmes Internet, parodiée avec une acuité gondolante. De l’art de choper le spectateur par le col : quelques plans plus tard, le récit débraie subitement et revient en arrière. Tout à coup, un choc esthétique se produit. Trop occupés qu’on était à se bidonner, on n’avait pas remarqué que LES MITCHELL CONTRE LES MACHINES détonait dans le monde si normé de l’animation américaine en CGI. Ce que propose le film s’impose ainsi en véritable vent de fraîcheur. Ici, pas de photoréalisme. Les décors ont tout de l’aquarelle et du dessin, les lignes embrassent d’être branlantes et les textures affichent des rendus que l’on croirait tout droit sortis d’artworks préparatoires. Une pure idée de mise en scène qui réifie les imperfections des Mitchell à l’image et qui va revêtir d’autant plus de sens que ce look artisanal se confronte bientôt aux lignes cassantes et aux perspectives infinies à la TRON du monde des machines. Porté par ce parti-pris épatant, LES MITCHELL déroule : le récit va à cent à l’heure, use à merveille de l’ellipse comme créatrice de gags, aligne une multitude d’idées drôles, débiles ou parfaitement justes. C’est sans doute là la grande force du film. Derrière le déluge de drôlerie et de références – Céline Sciamma  ! Un Furby géant ! Chrissy Teigen et John Legend en Instagrammeurs parfaits ! – se cachent rigueur et vérité. Si bien que le regard satirique sur le tout-connecté évite le passéisme. Surtout que le film préfère au final décaler son propos vers les Mitchell eux-mêmes et, en un tour de passe-passe, fait émerger l’émotion, juste et touchante, de la crétinerie.

De Michael Rianda & Jeff Rowe. Avec les voix originales de Abbi Jacobson, Maya Rudolph, Danny McBride, Olivia Colman. États-Unis. 1h53

4Etoiles

 

 

 

 

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