Annecy 2021 / CRYPTOZOO : chronique

Deuxième long métrage de Dash Shaw, CRYPTOZOO est une œuvre foisonnante à l’esprit politique acéré. 

 

En 2016, l’illustrateur et auteur de bande dessinée Dash Shaw avait déjà su imprimer les rétines avec MY ENTIRE SCHOOL SINKING INTO THE SEA, mélange drolatique et politique en animation de film catastrophe et de teenage movie. Avec CRYPTOZOO, il retrouve son style pictural où se mêlent dessin, collage, prise de vue réelle et surimpression. Un sublime foisonnement qui colle parfaitement à son sujet, l’histoire d’un zoo un peu particulier où est regroupé, à priori pour les protéger, tout un bestiaire d’animaux fantastiques, des centaures aux licornes en passant par les griffons et autres krakens. Nous sommes dans les États-Unis du début des années 1970, tiraillés entre les rêves du peace and love d’un côté et l’administration Nixon de l’autre. La vétérinaire Lauren Grey traque ces cryptides pour éviter qu’ils ne tombent aux mains des militaires. En particulier, la chimère baku, dévoreuse de rêve, que l’armée souhaite utiliser pour détruire les ambitions de la culture alternative émergente. Saccadé dans son animation qui ressemble davantage à une bande dessinée mouvante et inventive, CRYPTOZOO est cependant très fluide dans son propos politique. Métaphore de la situation des réfugiés, s’interrogeant sur la notion de marginalité, ou plus simplement fable écolo, le film pose de douloureuses questions sur le « comment agir ? » et se demande quel sens on donne au mot humanité : après tout, « est-ce qu’enfermer c’est protéger ? », « que reste-t-il d’un idéal lorsqu’il rencontre le chagrin du deuil ? » Dans cette œuvre bouleversante, visuellement et thématiquement, Dash Shaw raconte la cruelle fin des utopies, aidé par un casting voix impressionnant qui compte notamment Lake Bell, Michael Cela et Zoe Kazan. Sans pour autant nous décourager de rêver car « sans rêves, il n’y a pas de futur ».

De Dash Shaw. États-Unis. 1h35. Prochainement