SCREAM : chronique

12-01-2022 - 09:34 - Par

SCREAM : chronique

Dix ans après SCREAM 4, Ghostface reprend du service sans Wes Craven, ni Kevin Williamson. Tout est dit. (Aucun spoiler sur l’intrigue mais si vous voulez en savoir le moins possible sur la nature du film, ne lisez qu’après l’avoir vu)

 

On attendait un peu ce nouveau SCREAM comme le messie. La saga sanglante de Wes Craven et de Kevin Williamson incarne un certain âge d’or du cinéma d’horreur, à la fois fun et frontal, où la mise en scène ciselée savait se jouer des portes qui claquent et des maisons bien trop silencieuses, où l’écriture assez maligne savait entrelacer l’ironie sur le genre et la mélancolie d’un passé qui revient toujours hanter les survivants. La saga SCREAM a toujours eu de l’esprit et du cœur. Et des flaques de sang pour irriguer tout ça.

Du sang, il y en a dans ce nouvel opus signé du duo de réalisateurs derrière le sympathique WEDDING NIGHTMARE. Beaucoup même. Mais au service de quoi ? Pas grand-chose. Pourtant, au départ, on a très envie d’y croire. Et c’est peut-être la seule qualité de ce nouvel opus un peu passable : nous rappeler à quel point on aurait envie d’un bon SCREAM. Alors, on joue le jeu. On s’accroche. La scène d’introduction marche dans les pas de celle de l’original et donne le ton. Ce SCREAM nouveau ressemble à un jeu des 7 erreurs où la mythologie de la saga est constamment remâchée à l’écran par une bande de nouveaux personnages, décalque de la bande d’amis de Sidney Prescott du premier opus. De cette bande manquant clairement du charisme des originaux, on sauvera Mindy Meeks, l’héritière du cinéphile Randy, interprétée avec humour et désinvolture par Jasmin Savoy Brown, hélas sous-exploitée. SCREAM se fait copie pas tout à fait conforme, qui produit au départ le sentiment étrange, plutôt amusant même, d’assister à l’auto-remake un peu cheap du film par lui-même. On sourit, on s’amuse des clins d’œil. On n’est pas dupe. Ghostface a plus d’un tour dans sa cape et il y a bien plus que ça à se mettre sous la dent, non ? Non ? Ah…

Très vite, le film fait du surplace. Dans les pas de Sam Carpenter, jeune femme revenue à Woodsboro à la suite du retour de Ghostface, le film balise son propos et sa forme. Oui, il s’agit bien ici d’un simili remake dont les personnages du film seraient involontairement les héros – et les victimes. C’est en tout cas ce que le film ne cesse de nous raconter. Seul problème : il n’y a ni Wes Craven, ni Kevin Williamson à l’œuvre. Et ça se voit. Beaucoup. Tout est plus plat, plus explicatif, plus appliqué. En ne décidant jamais d’être frontalement un hommage ou une réinvention, le film n’est qu’un décalque déjà dépassé des films originaux. Une sorte de cahier des charges. Là où le SCREAM originel passait son temps à commenter les règles du genre puis à détourner avec un mauvais esprit et une ironie salvatrice les clichés et les passages obligés, ce SCREAM-ci finit par devenir ce cinéma d’horreur basique que moquaient Craven et Williamson avec amour. Le film devient alors bizarrement cynique. Un cynisme mou, de surcroît, qui consisterait à faire ironiser les personnages sur la question du remake alors que le film lui-même n’est rien d’autre que ça. Tout le long, on espère jubiler en se disant que le récit va réussir à nous surprendre et à déjouer sa petite rengaine sur l’état des sagas à Hollywood et sur les ‘legacyquels’. Mais, de scène attendue en scène attendue, ni tout à fait nulles mais jamais vraiment brillantes, à peine plus sanglantes que d’ordinaire (on sauvera une scène centrale, un peu inventive, en hommage à Hitchcock), SCREAM finit par se satisfaire de lui-même dans un scénario que ses auteurs doigent supposer très malin mais qui ne suscite au mieux qu’un haussement d’épaules un peu las. Il y avait sans doute plein de pistes possibles à aborder, de manières de nous surprendre, de donner du relief à cette nouvelle héroïne, à son histoire personnelle, plein de façons de prouver que tout l’art du remake tient à sa capacité à dialoguer avec le passé, à faire résonner les histoires à nouveau, à les transmettre – comme l’ont prouvé avec maestria récemment WEST SIDE STORY et MATRIX RESURRECTIONS. Mais les scénaristes de SCREAM ont choisi une voie de garage méta qui cantonne le film à un petit discours déjà obsolète.

Au final, le SCREAM 4 d’il y a 10 ans, mené par Craven et Williamson, apparaît beaucoup plus contemporain et malin que ce cinquième volet qui, à force de faire le malin, est déjà un peu périmé. À l’image de son trio iconique Neve Campbell, Courteney Cox, David Arquette, vraiment mal servis et réduits à des apparitions succinctes, ce retour de Ghostface sonne comme des retrouvailles obligées, un peu pénibles, où personne n’a grand-chose à se raconter, à part ressasser les mêmes anecdotes déformées par le temps. Ok Boomer.

De Matt Bettinelli-Olpin & Tyler Gillett. Avec Neve Campbell, Courteney Cox, David Arquette, Melissa Barrera, Dylan Minnette, Jack Quaid. États-Unis. 1h54. En salles le 12 décembre

2Etoiles

 

 

 

 

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