Le nouveau documentaire signé Raymond Depardon, coréalisé avec son épouse. Emouvant et prenant, mais malheureusement inégal.
Synopsis : C’est un journal, un voyage dans le temps, il photographie la France, elle retrouve des bouts de films inédits qu’il garde précieusement : ses débuts à la caméra, ses reportages autour du monde, des bribes de leur mémoire, de notre histoire.
Figure imposante du cinéma documentaire et de la photographie, Raymond Depardon fait partie de ces chroniqueurs du monde dont on choie le regard, qu’il le pose sur le monde paysan (PROFILS PAYSANS, LA VIE MODERNE), judiciaire (10e CHAMBRE, INSTANTS D’AUDIENCES) ou politique (1974, UNE PARTIE DE CAMPAGNE). Pour son nouvel opus, JOURNAL DE FRANCE, il nous propose une démarche double, qu’il assume avec son épouse – et ingénieure du son – Claudine Nougaret, ici co-réalisatrice. Pendant que lui part seul sur les routes de France pour photographier à la chambre des décors ou des personnages « pittoresques », elle classe des chutes des opus précédents de son mari, de ses débuts derrière la caméra à ses exercices les plus récents. Une schizophrénie esthétique et narrative qui ne joue pas nécessairement en faveur du film. Certes, les scènes inédites de 10e CHAMBRE, PARIS ou UNE PARTIE DE CAMPAGNE sont captivantes, bouleversantes, hilarantes, et permettent de se remémorer avec plaisir les films en question. Mais le processus apparaît presque comme l’épitaphe de l’artiste. Et ce, alors même que l’autre pan de JOURNAL DE FRANCE, prouve de la façon la plus directe qui soit la vivacité de Depardon. Un artiste bien vivant, toujours sur la brèche, chroniquant nos vies comme personne, avec l’appétit d’un jeunot et la tendresse d’un vieux singe à qui on ne la fait pas. Voir Depardon s’émerveiller d’un bureau de tabac au look années 50, rigoler avec un ancien maréchal-ferrant et ses potes glandant sur le même banc depuis 20 piges, ou partager sa mélancolie des couchers de soleil, demeure un spectacle enchanteur et extrêmement généreux. Dès que l’on repasse aux segments assumés par Nougaret, nous saisit la désagréable impression de voir l’œuvre de Depardon cataloguée bien trop tôt, avant même qu’il n’ait plus rien à dire. On aurait donc largement préféré que ces 100 minutes de film soient uniquement consacrées au tour de France du photographe, et ainsi à ce qu’il sait faire le mieux : nous photographier la trogne, et nous raconter notre présent.
De Raymond Depardon et Claudine Nougaret. France. 1h40. Sortie le 13 juin
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