Dans ce dynamitage en règle du rêve américain, Jonah Hill impose une énergie et un talent indécents.
On savait déjà que Jonah Hill, rejeton de la famille Apatow, était un acteur formidable de comédies. De SUPER GRAVE à 22 JUMP STREET, il a transformé sa bonhomie juvénile, autrefois arme d’identification chez les adolescents, en vectrice d’inquiétude et de malaise. Ainsi, la puissance de l’acteur devient une arme fatale dans les drames (LE STRATÈGE), dans les gangster movies en col blanc (LE LOUP DE WALL STREET) ou en chemise hawaïenne. Cheveux gominés, teint orange, chaîne en or qui brille : Jonah Hill débarque avec une énergie démentielle, et incarne Efraïm Diveroli, enfant biberonné à la vente d’armes, qui se rêve en Tony Montana du commerce d’AK47. Le rire hystérique haut perché, la gâchette facile, ce petit margoulin veut remonter la chaîne alimentaire de la guerre et être imbattable à chaque appel d’offre du gouvernement américain. Il n’a aucun agenda politique, il n’y connaît rien en arsenal militaire, mais il sait acheter, vendre et tourner à son avantage les nouvelles et si belles lois de l’administration Bush. Quand il retrouve David, un pote d’enfance (Miles Teller), il lui apprend les ficelles du métier. Et ensemble, les deux usurpateurs deviennent ce que l’Amérique leur a permis de devenir grâce à son capitalisme aveugle : de richissimes marchands de mort. L’histoire de WAR DOGS aurait sûrement due être racontée non du point de vue de David, mais plutôt de celui plus radical d’Efraïm. Mais ce qu’il aurait gagné en cynisme, il l’aurait probablement perdu en politique. Car c’est la chute idéologique de David qui intéresse davantage Todd Phillips. En exploitant l’air de gentil loser de Miles Teller, le réalisateur préfère raconter l’histoire d’un garçon qui s’est laissé aveugler par le champ des possibles que son pays lui offrait et qui va déchanter aussi sec, trahi par les méchants. En même temps, comment reprocher à un cinéaste de creuser sempiternellement le même sillon ? – Todd Phillips adore les situations hors de contrôle et les héros qui font des mauvais choix. Reste qu’il y a toujours chez lui un formidable sens comique – on rit énormément face à l’impérialisme dont Efraïm et David font preuve et à l’absurdité du commerce d’armes alimentant en toute impunité les conflits les plus sanglants. S’il serait facile de résumer WAR DOGS à un VERY BAD TRIP du fusil d’assaut, il faut tout de même avouer qu’il n’a pas une grosse personnalité. Même le ton – la satire un peu glauque – n’est pas franchement inédit. En revanche, outre certaines prestations débridées, le film a pour lui la force de son histoire vraie.
De Todd Phillips. Avec Miles Teller, Jonah Hill, Ana de Armas. États-Unis. 1h54. Sortie le 14 septembre
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