THE VAST OF NIGHT : chronique

04-07-2020 - 16:49 - Par

THE VAST OF NIGHT : chronique

Sorti de nulle part, un premier film aux inspirations écrasantes qui parvient pourtant, par sa mise en scène, à impressionner.

 

Tout commence par un plan sur un écran de télévision des années 50. Une voix invite à entrer dans le programme « Paradox Theater ». En une transition traversant le poste, THE VAST OF NIGHT devient l’épisode d’une série « à la » LA QUATRIÈME DIMENSION. Que le récit se déroule dans la ville de Cayuga, du nom de la société de production de Rod Serling, entérine la filiation. Vers la fin des années 50, Cayuga fête le début de la saison de basketball lycéen. Fay (Sierra McCormick), opératrice de téléphone et Everett (Jake Horowitz), animateur radio, vont tous deux recevoir des témoignages apeurés : un objet étrange stationnerait dans le ciel… Autoproduit, tourné pour moins d’un million de dollars, refusé par tous les festivals avant d’atterrir à Slamdance et d’y être repéré notamment par Steven Soderbergh, THE VAST OF NIGHT aurait pu sombrer dans l’exercice de style de petit malin, stérile à force de révérence. En quelques minutes, il s’impose au contraire comme un film de points de vue : des personnages, du metteur en scène et du spectateur. Tous sont ici engagés par la mise en scène et s’entremêlent dans la mécanique du récit. Dans le premier acte, une longue discussion sur le futur entre Fay et Everett ouvre une piste passionnante : la SF d’une époque deviendra la réalité d’une autre. Une simple constatation, vecteur immédiat de connivence entre le film et le spectateur, que le réalisateur Andrew Patterson nourrit en tenant le public au creux de sa main pendant 90 minutes. Déployant de très longs plans, certains à la discrète inertie – Fay à sa console d’opératrice, passant d’appel en appel pendant près de 10 minutes sans coupe –, d’autres d’une virtuosité ostensible – un plan-séquence très EVIL DEAD dans l’âme où la caméra parcourt les rues de Cayuga pour passer de Fay à Everett –, le réalisateur offre à son premier long un écrin visuel qui le sort immédiatement de la reconstitution pour préférer hybrider modernité et classicisme dans un grand élan de célébration du pouvoir d’évocation de la série B. À ce titre, Patterson joue de la connaissance qu’a chacun de tout un genre et de la « culture OVNI » – incroyable séquence où un témoin raconte son histoire en off, sur un écran noir, laissant le spectateur projeter ses propres images mentales. Plus fétichistes que frimeurs, les choix de mise en scène, et notamment un travail remarquable sur le son et ses textures, servent avant tout le récit et l’ambiance, tout en réclamant l’attention du public. Une vraie proposition de cinéma, qui ne sacrifie pas la générosité sur l’autel de sa maîtrise.

D’Andrew Patterson. Avec Jake Horowitz, Sierra McCormick, Gail Cronauer. États-Unis. 1h31. Sur Amazon Prime Video

4Etoiles

 

 

 

 

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