McCARTNEY 3, 2, 1 : chronique

25-08-2021 - 14:52 - Par

McCARTNEY 3, 2, 1 : chronique

Avant l’arrivée fin novembre de la trilogie THE BEATLES : GET BACK par Peter Jackson, Disney+ dévoile une mini-série documentaire centrée sur Paul McCartney. À la fois technique et érudite, mais accessible et généreuse. Indispensable pour comprendre l’un des artistes les plus influents de l’histoire.

 

« J’aimerais vous lire quelque chose, dit Rick Rubin à Paul McCartney dans l’un des épisodes de McCARTNEY 3, 2, 1. Paul est l’un des bassistes les plus innovants qui ait jamais existé et tout ce qui se fait aujourd’hui est pompé sur ce qu’il a fait avec les Beatles. C’est un très grand musicien. » McCartney rétorque, ironique : « C’est moi qui ai écrit ça ? » « C’est John Lennon », répond Rubin. « John ? Je n’avais jamais entendu ça. C’est magnifique », souffle le Beatle, pris de court. Cette anecdote vient éclairer une évidence à la fois logique et surprenante. Logique parce que les Beatles, en huit ans à peine, ont sculpté l’œuvre la plus dense, complexe et influente de l’histoire du rock. Surprenante parce qu’ils demeurent, pour cette raison, parmi les artistes les plus connus et révérés de ce dernier siècle – toutes disciplines confondues. « Je n’avais jamais entendu ça ». Logique, mais surprenant : en dépit de tout ce qui a été écrit, raconté, montré du Fab Four de Liverpool et de leur legs, il reste toujours à en apprendre. Là réside l’incroyable mérite de McCARTNEY 3, 2, 1, mini-série documentaire en six épisodes de trente minutes. Le dispositif est d’une limpide simplicité : dans un studio d’enregistrement, le producteur Rick Rubin (Beastie Boys, Public Enemy, Johnny Cash…) interviewe Paul McCartney. Au centre de la pièce, une console sur laquelle Rubin diffuse des masters des chansons des Beatles et de la carrière solo de McCartney. En rebondissant sur ce qu’ils écoutent, ils remontent le temps, abordent les sujets humains comme artistiques. Leur rencontre fait d’immédiates étincelles : Rubin, en artisan essentiel de la pop de ces quarante dernières années, connaît l’influence sismique qu’ont eu les Beatles. Il insuffle à McCARTNEY 3, 2, 1 une expertise indéniable qui ne perd pourtant pas de vue sa candeur de fan ni son admiration d’artiste. Si bien que McCartney, en confiance, se livre sans réticence. Sur sa console, Rubin met au silence certaines pistes pour en faire ressortir d’autres et met en lumière l’indicible, l’invisible, l’intangible. Ces petits riens, comme un cri qui déraille sur « Lucy In The Sky With Diamonds », ou ces grandes idées dissimulées derrière un mur de son qui font une chanson souvent sans que le plus grand nombre ne le saisisse. Comme cette ligne de basse pondue par McCartney sur le classique de George Harrison « While My Guitar Gently Weeps », qui, selon Rubin, « ne sonne même pas comme une basse ! », incroyable d’agressivité et de sécheresse, « comme si deux chansons différentes jouaient ensemble ». Essentielle car souvent mélodique et singulière, comme vivant indépendamment, la basse de McCartney soutient à la fois les chansons pour les embarquer ailleurs. McCARTNEY 3, 2, 1, sans oublier de disséquer l’apport de chaque Beatle, rappelle quel grand expérimentateur était McCartney (il a confectionné les boucles de « Tomorrow Never Knows », sommet de psychédélisme lennonien), lui qui s’est passionné pour l’avant-garde et l’a insufflé dans le son du groupe. Une manière de démentir l’inconscient collectif : non, Paul McCartney n’est pas ce garçon lisse, pourvoyeur uniquement de douces chansons d’amour, là où John Lennon serait l’audacieux électron libre. Il reste toutefois cet homme touchant, à part dans la mythique rock, qui révèle à Rubin qu’en raison de son enfance heureuse auprès de son père, « il avait longtemps cru que tout le monde avait des familles aimantes ». Une fenêtre ouverte sur le cœur et l’esprit d’un des derniers vrais géants.

McCartney 3, 2, 1. Avec Paul McCartney, Rick Rubin. Série documentaire. Sur Disney+

 

 

 

 

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