Cannes 2023 : ÉLÉMENTAIRE / Critique

27-05-2023 - 23:31 - Par

Cannes 2023 : ÉLÉMENTAIRE / Critique

De Peter Sohn. Sélection officielle, Hors compétition (Clôture)

 

Si ÉLÉMENTAIRE n’a pas la liberté du précédent film de Peter Sohn, LE VOYAGE D’ARLO, il retrouve ce qui en faisait sa beauté : la sincérité des émotions.

Un couple de Flamboyants débarque à Element City, fondée par les Aquatiques, pour y mener une vie meilleure. Deux décennies plus tard, Bernie et Cinder tiennent une épicerie destinée à leurs congénères. Ils espèrent la léguer à leur fille, Ember. Mais ces plans vont être bouleversés quand le destin met Wade, un Aquatique, sur le chemin de la jeune fille… Après le typique récit du « garçon et son chien » dans le splendide VOYAGE D’ARLO, Peter Sohn embrasse à nouveau un schéma classique pour son deuxième long-métrage, ÉLÉMENTAIRE, celui du duo mal assorti, qu’il ne mène pas sur le territoire du buddy movie mais de la romcom. Usant des codes, voire des passages obligés du genre – conflit, rapprochement, déception, amour –, ÉLÉMENTAIRE pourrait se borner à n’être qu’un spectacle attendu. Il se révèle d’ailleurs moins surprenant, moins ouvertement libre que LE VOYAGE D’ARLO qui, dans sa forme et son récit, prenait nombre de chemins de traverse, jouant parfois la carte de la contemplation ou de l’errance poétique. Rien de tout ça dans ÉLEMENTAIRE, situé dans des balises davantage connues, quelque part entre ZOOTOPIE pour le décor et son world building et VICE-VERSA pour l’anthropomorphisation de concepts – ici les personnages représentent les quatre éléments avec un souci esthétique notable, le feu joliment incarné par un rendu de crayonné. Dans ce cadre classique, le premier acte d’ÉLÉMENTAIRE peine parfois à convaincre. Après une très jolie ouverture qui relie le destin de Bernie et Cinder à celui de millions d’immigrants, dont les parents de Peter Sohn lui-même, partis de Corée du Sud pour New York au début des années 70, le récit connaît quelques à-coups, notamment dans ses saillies humoristiques et burlesques, qui manquent de légèreté. Puis, peu à peu, une magie s’installe. Durant la confection d’ÉLÉMENTAIRE, Peter Sohn a perdu ses deux parents. Le film, qui confronte le réalisateur à ses souvenirs d’enfance, rend hommage à leur parcours d’immigrants, à leurs sacrifices et au poids que ceux-ci ont pu faire peser sur ses épaules. Ce cœur dramaturgique très personnel propulse ÉLÉMENTAIRE dans des sphères émotionnelles authentiques où chaque idée, chaque sentiment, apparaît d’une sincérité désarmante. En injectant d’autres éléments de sa vie, Sohn bâtit également une fable hautement politique abordant de front la ségrégation, la discrimination, la mixité, le métissage, etc. De sa spécificité, le réalisateur atteint alors une universalité et partage avec le spectateur des émotions qui, vers la fin du récit, se font particulièrement puissantes et touchantes.

De Peter Sohn. Avec les voix originales de Leah Lewis, Mamoudou Athié, Ronnie Del Carmen. États-Unis. 1h33. En salles le 21 juin

 

 

 

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