WILD : chronique

14-01-2015 - 12:17 - Par

Si son propos n’a rien d’original, WILD touche par la finesse de sa narration et de l’interprétation de Reese Witherspoon.

Outre son amour pour les figures marginales ou ostracisées, le cinéaste québécois Jean-Marc Vallée semble aujourd’hui mettre un point d’honneur à suivre des personnes ravagées par leurs excès mais décidées à reprendre le contrôle de leur existence, à reconquérir leur dignité. Un an après DALLAS BUYERS CLUB, il récidive avec WILD qui, bien que dans la lignée de son prédécesseur, s’avère une réussite plus marquante et à la plus grande personnalité. Sur le papier, WILD n’a pourtant rien de surprenant ou de foncièrement original. Lorsque le récit débute, Cheryl Strayed (Reese Witherspoon) s’engage dans un défi de taille : faire seule la randonnée du Pacific Crest Tail, un ‘sentier’ de 4200 kilomètres reliant, à l’Ouest des États-Unis, la frontière mexicaine à celle canadienne. Pourquoi la frêle jeune femme tente-t-elle cette aventure ? Pour des tas de raisons, que WILD dévoile peu à peu, via une foule de flash-backs et de voix off faisant office de journal de bord. Alors qu’ils ne sont souvent que des artifices rebattus choisis surtout pour leur praticité, ces outils narratifs font ici sens. Ils se justifient même totalement, puisque le film se veut un voyage physique autant qu’introspectif durant lequel Cheryl interroge son passé, ses erreurs, ses regrets et tente de « marcher jusqu’à retrouver la femme que sa mère voyait en [elle] ». De constants allers-retours dans le temps et de lancinants commentaires viennent rythmer sa randonnée, offrant à WILD une vraie maturité où les enjeux s’emboîtent pour former au final un tout indéniable- ment cohérent. Un mécanisme d’autant plus plaisant à suivre que, outre la fine écriture de Nick Hornby (l’auteur des romans « Haute Fidélité » ou « À propos d’un gamin » est ici scénariste), on ne peut que saluer le travail de déconstruction / reconstruction effectué par Vallée et son monteur Martin Pensa, et notamment leur façon d’étirer les flash-backs, de subreptices images quasi subliminales dénuées de son – comme des pensées traversant furtivement l’esprit de Cheryl– à des souvenirs contés de manière plus conventionnelle et fonctionnelle. Cette fluidité esthétique et narrative extirpe WILD du lot des « films introspectifs de retour à la nature ». Surtout, elle lui évite de tomber dans le piège du « film témoignage pour trentenaires lectrices de Cosmo » – WILD s’inspire pourtant d’une histoire vraie contée dans un best-seller éponyme. Enfin, et ce n’est pas une mince qualité, WILD donne l’occasion de retrouver une Reese Witherspoon à la hauteur de son talent, pour une mise à nu littérale et figurée, touchante et téméraire.

De Jean-Marc Vallée. Avec Reese Witherspoon, Laura Dern, Gaby Hoffmann. États-Unis. 1h59. Sortie le 14 janvier

 

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