SPACE SWEEPERS : chronique

05-02-2021 - 09:00 - Par

SPACE SWEEPERS : chronique

Conçu pour le grand écran, le ‘premier space opera du cinéma sud-coréen’ débarque finalement sur Netflix – Covid oblige. Des scories, mais un chouette moment.

 

2092. La pollution ravage la Terre. La firme UTS, dirigée par le milliardaire Sullivan, a installé une société privilégiée en orbite. Grâce à la terraformation, il projette de créer un nouvel Eden sur Mars, lui aussi réservé à une minorité. Ses plans vont être contrariés lorsqu’un équipage coréen de ferrailleurs de l’espace trouve une petite fille qui pourrait bien incarner l’espoir dont la Terre a besoin…

En orbite autour de la Terre, plusieurs vaisseaux de ferrailleurs de toutes nationalités se disputent la carlingue d’un navire en perdition. Surgissent leurs concurrents, l’équipage coréen du Victory. ‘Dégagez, bande d’incompétents !’, hurle la capitaine. Anodin ? Pas tout à fait, si l’on considère que SPACE SWEEPERS a été étiqueté ‘premier space opera du cinéma sud-coréen’ et se présente avec de sérieuses ambitions. Tout à coup, cette confiance désinvolte et la manière dont le Victory ridiculise ses collègues pourraient presque symboliser la velléité du cinéaste Jo Sung-hee (A WEREWOLF BOY), et plus largement de l’industrie sud-coréenne, de partir à l’abordage de tout un cinéma jusque-là dominé par Hollywood – et dans une moindre mesure par l’Inde, la Russie, la Chine et, en son temps, le Japon. Il faut dire que SPACE SWEEPERS a de sérieux arguments.

Tout d’abord, la production value souvent ahurissante des blockbusters sud-coréens qui, à l’écran, paraissent bien plus onéreux qu’ils le sont. SPACE SWEEPERS n’a ainsi coûté que 21 millions de dollars et, grâce aux excellents VFX de Dexter Studios, déjà aux commandes sur ALONG WITH THE GODS, PARASITE ou DESTRUCTION FINALE, ne démérite pas. Son casting, ensuite, qui regroupe Kim Tae-ri (MADEMOISELLE), Song Joong-ki (BATTLESHIP ISLAND) et Jin Seon-kyu (KINGDOM, EXTREME JOB). Enfin, la promesse d’un projet spectaculaire mais de cœur pour Jo Sung-hee, qui y travaille depuis plus de dix ans. Autant d’arguments, et d’ambitions corrélées qui, au départ, ne suffisent pas. Les quarante premières minutes de SPACE SWEEPERS pourraient bien ruiner la curiosité de nombreux spectateurs, tant la construction de l’univers et l’exposition se révèlent longues, parfois laborieuses, incapables de prioriser informations et caractérisations. On décèle ici et là les traumas des personnages, certains attisent l’intérêt. Émerge aussi un propos conscient écologiquement, cinglant sur la lutte des classes – sujet récurrent du cinéma sud-coréen – et particulièrement méfiant des Elon Musk de ce monde, gourous du futur et du progrès technologique. Pourtant, SPACE SWEEPERS peine, tant ce premier acte accumule les digressions et manque de rigueur – et donc d’intensité. Que le grand méchant soit campé par un Richard Armitage en totale roue libre n’aide pas…

Puis un petit miracle se produit. Une fois passées ces quarante minutes d’exposition, une fois le récit mis en place, SPACE SWEEPERS prend ses marques, et le spectateur avec. Les passages obligés et autres images d’Épinal sont légion, certes. Mais le tout fonctionne grâce aux héros du Victory, tous bien croqués et interprétés avec envie. Avec son 1.85, qui vise davantage l’impact que l’évocation, Jo Sung-hee affirme une générosité de chaque instant et, dans le dernier tiers, façonne même quelques séquences particulièrement réussies et excitantes de ballets spatiaux. Les amateurs et habitués du cinéma mainstream sud-coréen seront sans doute plus réceptifs que les profanes, tant l’esprit développé ici se révèle typique : mélange des tons (la comédie, grâce à la dextérité de Jin Seon-kyu en la matière, se révèle convaincante en dépit de quelques saillies scatologiques dispensables), vision romanesque et sacrificielle de l’héroïsme, et sentimentalisme assumé. Calibré pour le grand public mais affirmant son identité – on n’est ni dans STAR WARS, ni dans LES GARDIENS DE LA GALAXIE, ni dans COBRA – SPACE SWEEPERS se révèle au final un bon moment de divertissement. Gageons que, si suites il y a, un supplément de rigueur permettra à la franchise de totalement soumettre ses concurrents. Et nous avec.

De Jo Sung-hee. Avec Kim Tae-ri, Song Joong-ki, Jin Seon-kyu, Richard Armitage. Corée du Sud. 2h16. Le 5 février sur Netflix

3Etoiles

 

 

 

 

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