SOUL : chronique

23-12-2020 - 17:56 - Par

SOUL : chronique

Après le centre des émotions dans VICE-VERSA, Pete Docter se penche sur un autre mystère métaphysique : l’âme. Du Pixar à son meilleur.

 

Joe (Jamie Foxx / Omar Sy), prof de musique dans un collège de New York, ne rêve que d’une chose : être pianiste de jazz. Le jour où il décroche enfin un contrat, un accident vient le faucher. Dans l’au-delà, il refuse d’aller vers la Grande Lumière et échoue dans le Grand Avant, où l’on prépare les âmes à naître en leur trouvant une flamme. Joe doit alors aider 22 (Tina Fey / Camille Cottin) à dégotter la sienne… « Waow, ça fait beaucoup d’informations », entend-on lorsqu’on explique à Joe le fonctionnement du Grand Avant. Tout comme dans VICE-VERSA, Pete Docter embrasse ici un concept extrêmement fort et questionne un mystère métaphysico-existentiel. SOUL s’engage ainsi sur un territoire inconnu et doit donc donner vie à l’écran à une réalité concrète reposant sur des notions totalement abstraites. Pourtant, cette visite guidée n’a rien de laborieux et intimide davantage pour l’inventivité dont elle fait preuve, entre idées folles, gags à la minute et parti-pris marquants à la limite de l’expérimental – à l’image de ce générique introductif qui suit la mort de Joe et voit son âme traverser divers états en noir et blanc proches du croquis. Docter et son co-réalisateur Kemp Powers convoquent des images particulièrement dures (les âmes se grillent sur la Grande Lumière comme des moustiques) et regardent dans le blanc des yeux notre mortalité, mais aussi le phénomène-même de la mort. Bon courage aux parents dont les enfants demanderont le matin de Noël si « c’est là qu’est partie mamie ». Mais SOUL ne laisse pas le spectateur s’émerveiller bien longtemps, son récit perpétuellement en mouvement. Parfois trop : à mi-parcours, il souffre du syndrome COCO et multiplie artificiellement les rebondissements. Quinze minutes qui entament un peu sa singularité, avant que Docter et Powers ne redressent la barre avec l’introduction d’un personnage sublimement barré, Moonwind (Graham Norton / Ramzy Bedia), et d’idées toujours plus fortes – dont ces âmes en peine enfermées dans leurs névroses ou leurs plaisirs. Buddy movie entre une âme qui ne veut pas vivre et une autre qui ne veut pas mourir, SOUL assume dans ces contraires sa nature jazz, entre impro et technicité, et riff, pas loin de l’état de grâce. Explose ainsi à l’écran le brio de sa mécanique où le foisonnement (le photoréalisme des CGI à New York ; le score jazz de Jonathan Batiste) cohabite avec l’épure (les lignes cubistes de l’au-delà et du Grand Avant ; le score électro de Reznor & Ross), métaphore bouleversante d’une existence qui nous condamne à naviguer dans sa complexité pour en saisir l’essentiel.

De Pete Docter & Kemp Powers. Avec les voix originales de Jamie Foxx, Tina Fey. États-Unis. 1h40. Le 25 décembre sur Disney+

4Etoiles

 

 

 

 

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