GODLAND : chronique

21-12-2022 - 11:27 - Par

GODLAND : chronique

La tempête s’empare de l’image mais quelque chose nous échappe dans cette retraite évangélique en Islande.

 

L’Islande a un passif avec le Danemark : l’île est sous domination danoise jusqu’à ce qu’elle obtienne son indépendance en 1944. Les deux pays partagent une frontière maritime aujourd’hui mais guère plus – sauf à regarder le nombre de réalisateurs islandais qui sont partis étudier le cinéma à Copenhague, en attendant que des formations soient proposées dans le pays. Dans GODLAND qui se déroule fin XIXe, règne une passive hostilité entre les deux nations, qui peu à peu se fait plus agressive, et cours de l’Histoire oblige, les Danois n’en sortent pas forcément gagnants. Le film de Hlynur Palmason (déjà auteur du formidable UN JOUR SI BLANC) raconte même comment l’Islande éreinte, érode, dévore et recrache quiconque y débarquerait en terrain conquis. C’est un peu le cas du prêtre danois (Elliott Crosset Hove) envoyé là-bas avec une double mission : photographier la population et les paysages et bâtir une église. Ainsi, au lieu de débarquer près du village, il accoste loin pour le rejoindre à pied. Il espère entre-temps apprivoiser les lieux. Accueilli fraîchement par Ragnar (Ingvar Sigurdsson), il va comprendre que l’approbation de Dieu ne vaut pas tous les blancs-seings. Cheminant, il faute, s’épuise, prend de plein fouet une nature incorruptible et indomptable. Dès qu’il pose pied sur la plage, les éléments se déchaînent et ce qui est d’abord pittoresque et grandiose, avec ses cascades gigantesques, ses grottes, ses rivières, son herbe spongieuse, se transforme vite en un enfer dantesque de boue, de pierres et de courants. Dans un format 1:33, rappelant les photographies retrouvées en terre islandaise qui ont inspiré le film, Hlynur Palmason frappe tout de même la pellicule d’une image tempétueuse et épique. Le prêtre, lui, peine à s’échapper de ce cadre restreint, alors qu’il s’attendait sûrement à conquérir l’espace. Dès que GODLAND plante sa tante au village où l’église sera construite, plus particulièrement chez une petite famille de Danois d’Islande, ce n’est plus tant la nature qui vise à éliminer les intrus que la population elle-même, avec qui la greffe ne prend pas. Le film devient alors ce drame de personnages plus prévisible, il perd en puissance de l’image et nous égare dans son propos. La cible, le message, sont distillés dans la chronique d’un amour impossible et certains personnages, qui semblent avoir été intégrés aux forceps, ralentissent l’efficacité d’une première partie bulldozer. Au bout d’une grosse heure redoutable et d’une seconde plus convenue, le film parvient quand même à s’achever avec force sur une image dévorante.

De Hlynur Palmason. Avec Elliot Crosset Hove, Victoria Carmen Sonne, Ingvar Sigurdsson. Islande. 2h23. En salles le 21 décembre

 

Note : 3/5

 

 

 

 

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