LE CROQUE-MITAINE : chronique

31-05-2023 - 17:52 - Par

LE CROQUE-MITAINE : chronique

Lorgnant davantage du côté de Mike Flanagan que de productions impersonnelles, le premier film de studio de Rob Savage est une réussite.

 

En 2021, Rob Savage, anglais d’une trentaine d’années qui tourne longs et courts-métrages depuis ses 17 ans, invitait dans HOST toutes les angoisses du confinement via une séance de spiritisme en Zoom qui tournait très mal. 57 minutes d’effroi, d’idées fortes et de DIY qui l’imposaient en grand espoir du cinéma de genre. Son DASHCAM, autre néo-found footage, hébergé chez Blumhouse, n’a que récemment trouvé distributeur en France et on le retrouve déjà pour LE CROQUE-MITAINE, sa première production de studio. Et pas des moindres puisqu’il s’agit, pour Fox/Disney, de l’adaptation d’une nouvelle de Stephen King publiée en 1978 dans le recueil « Danse macabre ». Le romancier, sur une poignée de pages, y suivait un père confier à un psy que la mort de ses trois enfants était due à une créature cachée dans le placard de leurs chambres… LE CROQUE-MITAINE s’affirme presque davantage comme une suite de la nouvelle : si l’on retrouve le père et sa confidence, le film s’intéresse ensuite au thérapeute et à ses deux filles, bientôt eux aussi assaillis par une créature se nourrissant de leur peine – la mère vient de mourir dans un accident de voiture. Sur le papier, LE CROQUE-MITAINE a tout d’un énième film d’horreur calibré. Pourtant, s’il est indéniablement plus mainstream que HOST, régi par des mécanismes visuels et narratifs plus traditionnels, il se hisse bien au-dessus de la moyenne. Après une introduction très puissante, panoramique circulaire dans une chambre d’enfant qui joue avec ce que l’on peut voir et entendre, LE CROQUE-MITAINE ne s’empresse pas d’imposer un tout-intrigue. Il s’aligne sur ce qui fait la force des meilleurs écrits de King : l’observation patiente de personnages dans leur existence quotidienne – routines, gestes, sentiments –, bien aidée par d’impeccables prestations de Chris Messina, Sophie Thatcher et Vivien Lyra Blair. Parce que les personnages sont traités avec respect et l’intrigue patiemment incorporée dans leur vie, l’horreur s’installe avec d’autant plus d’impact. Entre un travail sur le son dantesque (musique diégétique, score et effets sonores se superposent en un tourbillon écrasant), de belles idées de mise en scène de la lumière et des ténèbres (une lampe Lune qui roule au sol ; les flashes d’un jeu vidéo dans un salon…) et un jeu pertinent et réussi sur le champ et le hors champ, Rob Savage établit une grammaire visuelle efficace, tant dans l’effroi que l’empathie, versant juste ce qu’il faut dans le symbolisme. Le tout ayant l’élégance de se conclure avec justesse et logique, toujours au diapason du parcours émotionnel des personnages.

De Rob Savage. Avec Chris Messina, Sophie Thatcher, Vivien Lyra Blair. États-Unis. 1h50. En salles le 31 mai

Note : 4

 

 
 

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