FLAG DAY : chronique

29-09-2021 - 09:26 - Par

FLAG DAY : chronique

Sean Penn se relève de THE LAST FACE en chroniquant la relation, sur trois décennies, d’un arnaqueur et de sa fille. Simple et touchant.

 

Au centre de la bande originale de FLAG DAY trône le tube country pop « Night Moves » de Bob Seger, morceau d’Americana qui exalte les champs de maïs, les 60’s Chevy et les nuits de tonnerre. Un morceau de nostalgie aussi, contant les souvenirs d’un premier amour d’été. Sentimental, fantasmatique comme peut l’être l’Amérique quand on ne la connaît qu’à travers sa culture pop, ample comme ses décors de western. Et simple, pourtant. Qui coule avec l’évidence que seuls ont les tubes qu’on croit avoir connus toute notre vie. Il y a un peu de tout ça dans FLAG DAY et tout ce que cela entraîne en maladresses. Mais en tendresse, aussi. Lorsque le film débute, avec ses images de thrillers dans les badlands, sa voix off et ses ralentis cramés sur des souvenirs d’enfance, la crainte est grande de voir Sean Penn s’égarer à nouveau et livrer son LAST FACE sur les relations père/fille. Puis le récit se pose et survient une scène splendide, la première que Penn partage avec sa fille Dylan, dans un diner décrépit, que les deux irradient de leur alchimie totale. Tout à coup, FLAG DAY s’incarne. Simple, évident. Là réside, résumé en quelques dialogues et un bête champ/contre-champ, la beauté limpide du cinéma américain, sa capacité à réifier des sentiments universels, à résonner en nous un peu plus que les autres. Bientôt, FLAG DAY s’envole, mais prudemment. Il ne cherche pas les sommets, même s’il nous y mène parfois, notamment avec sa bouleversante conclusion. Il embrasse une efficacité classique et des élans de mélo, se concentre sur ses beaux personnages, pétris de défauts et débordants d’amour. Penn les filme – il se filme même pour la première fois, acteur parfait de son cinéma – en un beau 16mm granuleux et lumineux, en gros plans, héros claudicants d’une Amérique des patelins agonisants, prenant le rêve américain au mot sans y croire vraiment. Il y a là les échos mélancoliques d’INDIAN RUNNER, les idéaux illusoires d’INTO THE WILD, les sentiments contraires de CROSSING GUARD. Et le cœur chamallow de « Night Moves » qui résonne. Peut-être que Sean Penn, après le dérapage THE LAST FACE, ressentait-il lui-même une certaine nostalgie, l’envie de revenir à un cinéma qu’il connaît parfaitement, à des lieux qui semblent avoir peuplé toute sa carrière depuis LES MOISSONS DU PRINTEMPS ou COMME UN CHIEN ENRAGÉ. De ce qu’il dit de lui-même, de son ego, de ses erreurs, de sa nature d’ours parfois exagérément contrit, émerge une certaine humilité, mais aussi presque un clin d’œil à ceux qui l’aiment, à ceux qu’il a déçus, à ceux qui le croyaient fini. Un beau geste, touchant et élégant, de cinéaste et d’acteur. 

De Sean Penn. Avec Dylan Penn, Sean Penn, Josh Brolin. États-Unis. 1h48. En salles le 29 septembre

4Etoiles

 

 

 

 

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